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Drames des migrants: le choc d’une mondialisation à deux vitesses

Révolté face au manque d’implication des gouvernements concernés par les récents drames de migrants et face à l’attitude opportuniste et inhumaine de l’agence Frontex, un jeune photojournaliste, qui travaille depuis plusieurs mois sur le thème de l’immigration clandestine entre Afrique et Europe, témoigne. Son point de vue a retenu notre attention. Alimentée de notre analyse, nous vous partageons sa vision alternative des causes et responsabilités de ces drames humains qui emportent hommes, femmes et enfants, migrants sans visage, désespérés, livrés aux mains de passeurs mafieux.

Clément Burelle
Mr Mondialisation
26 Apr 2015

Suite aux derniers évènements en Italie¹ (800 migrants ont de nouveau trouvé la mort en Méditerranée le dimanche 19 Avril), on constate une nouvelle frénésie autour d’images chocs liées à une « invasion » de migrants venant « en masse » sur les côtés européennes. Nos politiques réitèrent les mêmes discours valables d’année en année « il faut agir maintenant ».

Mais qui s’interroge sur « le pourquoi » de ces tentatives de migrations en masse…?

Kadjali, jeune gambien rescapé de deux naufrages à Lampedusa – 2014 © Clément Burelle

Et si le problème venait du fonctionnement de nos sociétés ?
Outre les mécanismes viciés de la dette, les dogmes du FMI imposent l’ouverture des frontières aux importations, accompagnée de politiques d’ajustement mettant à mal l’autonomie alimentaire locale des pays et le peu de services publics que les indépendances avaient réussi à développer.

Conséquence, un protectionnisme aux arguments bancals favorise systématiquement le Nord : la politique agricole communautaire ou la subvention du coton américain, par exemple, plombent la production africaine. Les monocultures intensives implantées par des grands groupes européens font table rase de l’agriculture vivrière (auto-consommation). L’importation à prix cassé de riz brisé asiatique² supplante le riz autochtone.

« L’impérialisme c’est quoi ? Regardez dans vos assiettes quand vous mangez: les grains de riz, de maïs, de mil importés, c’est ça l’impérialisme. » – Thomas Sankara³, président du Burkina Faso assassiné le 15 octobre 1987

Autre exemple, Au Sénégal, des accords de pêche iniques4 ouvrent la voie au saccage des ressources halieutiques par les bateaux-usines japonais et européens. Citons les rouages corrupteurs de la Françafrique, les guerres du diamant, le pillage du pétrole, de l’or, de l’uranium, du coltan, de la bauxite, accaparement des terres, massacre environnemental du golf du Niger… La responsabilité directe de l’occident dans la situation désespérante de millions d’africains n’est plus à démontrer. Nous sommes d’ailleurs très nombreux à nous indigner devant des reportages où femmes et enfants souffrent d’exploitations alors que les acteurs occidentaux jouent un rôle majeur dans la perpétuation de ces inégalités.

Une question se pose alors : Avant de prétendre contrôler les mouvements migratoires, ne vaudrait-il mieux pas tenter de freiner la mise à sac des mers et des terres africaines ? Mais qui serait assez insolent pour exiger cela d’un système qui se prétend juste et équitable ? Ce serait contraire à « la liberté d’entreprendre » ! Alors pour protéger cette illusion de liberté, on enferme les populations derrière des grilles. Drôle de paradoxe!

« Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finira par perdre les deux. » – Benjamin Franklin

Il parait incroyable que la terre de la dite « démocratie » soit contrainte aujourd’hui de construire un mur autour d’elle et que des soldats doivent la défendre par le biais d’une agence nommée Frontex. Une illusion de liberté et de justice que nous vendent nos politiques au quotidien. L’exemple le plus affligeant (après celui de Bush) est certainement celui de Zappatero (chef du gouvernement espagnol de 2004 à 2011) qui affirmait durant un discours au Mexique en 2007 devant les nouvelles barrières installées par les USA : « Il n’y a pas de mur, aussi haut, long et large soit-il, capable de s’opposer au rêve d’une vie meilleure. »

Bien sur, ce jour là, il n’évoquait pas ses contrats signés en 2005 au sujet de la « muraille d’intelligence radicale » (MIR) de l’enclave espagnole de Melilla.

La liste de ces illusions de liberté et justice est longue. La puissance des mots sur « le théâtre des opérations » est primordiale pour convaincre le spectateur et lui donner ce sentiment d’agressé nécessaire pour parvenir à restreindre toujours plus sa propre liberté (plus que jamais d’actualité avec le nouveau projet de loi liberticide sur le renseignement). Il est triste de constater que circuler sans entraves dans le village global est aujourd’hui le privilège des marchandises, des capitaux et des citoyens occidentaux – dont beaucoup malgré les revenus modestes, peuvent aller jouer aux riches dans les pays du Sud, afin de faire travailler l’industrie du tourisme à bas prix (majoritairement européenne).

En 2005 l’immigration clandestine faisait face à un bouleversement et je suppose qu’aujourd’hui, 10 ans plus tard, nous passons à une nouvelle étape avec ces « vagues de bateaux déferlant sur l’Europe. » Sorte de manipulation par la peur mise en place par l’Europe, reprenant les mêmes stratégie qu’en 2005.

Que s’est il passé durant cette année clé ?
De nombreuses agressions avaient eu lieu côté marocain (près des enclaves espagnoles de Melilla et Ceuta). En juin 2005 on découvrait alors ces effroyables images de Ceuta, des vagues de migrants tentant la traversée en masse (plus de 2000 migrants) et passant par dessus les grilles comme un seul homme.

Ces assauts groupés étaient la conséquence directe du harcèlement accru auquel les forces auxiliaires marocaines soumettaient depuis le début de l’année les campements de clandestins installés aux abords des deux villes espagnoles de Melilla et Ceuta.

Ce changement d’attitude interloquait toutes les organisations d’aides aux réfugiés. José Palazon (à la direction de l’association d’aide aux réfugiés PRODEIN de Melilla confiait d’ailleurs au printemps 2005 : « Avant les migrants sautaient le grillage par petits groupes et des que la guardia civil les repérait, ils levaient les bras et retournaient vers le Maroc sans opposer de résistance. Ce sont les raids sur les camps, les refoulements dans le désert et les brutalités policière qui ont provoqué ces expéditions désespérées. »

Du jour au lendemain les médias traitaient ce sujet en boucle ayant pour effet d’alimenter la peur de l’étranger venu nous envahir. Le coupable parfait à la crise restera toujours la différence. Bien sur, sans jamais s’interroger sur les causes qui provoquent, d’une part, l’immigration, d’autre part, ces assauts soudainement groupés qui n’avaient jusque là jamais eu lieu.

Manipulation de l’opinion ?
En 2005, El Pais (revue espagnole) évoquait la thèse d’une éventuelle manipulation des troupes marocaines par le gouvernement espagnol. Après études, 14 ONG demandaient au gouvernement de Zappatero de s’expliquer sur ces accusations (toutes déboutées…). Quelle serait l’intérêt d’une telle manipulation ? Probablement à cause de sa concomitance avec le sommet hispano-marocain organisé à Seville quelques mois plus tard du 28 au 30 septembre 2005.

Selon diverses ONG, le Maroc aurait acculé les clandestins à attaquer la frontière afin d’instrumentaliser l’effroi suscité et de négocier aux côtés de l’Espagne la hausse des aides de l’Union Européenne. Ainsi l’année 2005 aura été une période de réajustement exceptionnelle dans la gestion de la frontière. Les effets immédiats : l’envoi de renforts a accentué la militarisation de la frontière, 700 légionnaires côté espagnol et 1600 membres des forces auxiliaires ce qui portait à un total de 2700 le nombre de garde frontières.

Mais lors de ces sommets, les tractations ne portaient bien sur pas uniquement sur « le problème de l’immigration. » Ainsi la même année, en échange de 160 millions d’euros versés par le FAD-OCDE au Maroc (Organisation de coopération et développement économique), l’Espagne obtint – comme par miracle – quatorze projets d’exploitation de ressources naturelles marocaines (phosphate, fer, argent, or, sable de silice).

A toute vitesse et grâce à l’injection de 20 millions d’euros, L’Europe a continué à surélever ses remparts (passant de 3m50 à 6 mètres) tout en ajoutant une troisième grille entre les deux dite « non agressive » . L’édification de cette muraille fut achevée à l’été 2006. Elle comprend notamment un système de panneaux mobiles, sorte de catapultes permettant d’éjecter les assaillants (dans le vide). Un système d’alarmes et de gaz lacrymogène au piment tous les 100 mètres. Face à cette nouvelle muraille qu’on croirait sortie d’un mauvais film hollywoodien, les trajets se voyaient changer…

Mais loin de disparaitre, les routes clandestines n’ont fait qu’emprunter de nouveaux itinéraires. Selon Reuters (dépêche du 19 mai 2006) de janvier à mai 2006, environ 7000 clandestins débarquèrent aux Canaries, 5 fois plus qu’en 2005 au cours de la même période. Ce nombre d’arrivées auraient ensuite chuté de 70% dés l’entrée en action de l’agence Frontex.

Frontex, la milice privée qui « protège » l’Europe
Frontex c’est quoi ? Une agence européenne pour la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des états membres de l’UE. Elle agit pour ainsi dire, comme une sorte de milice privée pour l’Europe. Cette agence est entrée en action 6 mois après les évènements de Ceuta et Melilla (avec les opérations Héra focalisées uniquement sur les Canaries).

Ces périlleuses traversées des eaux atlantiques ayant été multipliées par cinq depuis le verrouillage de Gibraltar, on peut en conclure que la médiatisation des « attaques » de 2005 aurait servi – entre autres – de rampe de lancement à Frontex. En dehors de tout contrôle démocratique, cette agence a été créée par règlement en 2004. Elle est d’ailleurs décrite par Jean Ziegler (homme politique et sociologue suisse , rapporteur spécial auprès de l’ONU) comme « une organisation militaire semi clandestine » (L’empire de la honte aux éditions Fayards).

Sans surprise, dans leur rapport annuel de 2006, L’UE et Frontex n’évoquaient pas le nombre de morts en mers qui aurait augmenté de 50%. C’est ainsi que les trajets se sont trouvés à nouveau bouleversés et qu’en 2008, 30.000 « boats people » ont débarqué sur les côtes italiennes, 10.000 de plus qu’en 2007 (Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés).

Acculés aux barrières les trajets ne cessent de changer et ne font que s’adapter à la violence de nos frontières.
Ainsi entre 2007 et 2013 Frontex se voyait allouer un budget par l’Europe de 1247 millions d’euros (Frontex, lecture critique de Maud Marie Boliveau). Rien de mieux que la guerre en temps de crise. 900 millions ont servi à la mise en place de « systèmes d’informations à grande échelle » et 62 millions pour la création d’un observatoire des migrations. Il saute aux yeux que Frontex n’a pas pour mission le sauvetage d’individus en mer. Embryon d’armée européenne, sa présence est bien plus que dissuasive mais joue aussi et surtout un rôle dans une aggravation du contexte géopolitique mondial provoquant toujours plus de victimes.

18/19 avril 2015 : 700 morts
15 avril 2015 : 400 morts
15 septembre 2014 : 500 morts
12 octobre 2013 : 50 morts
3 octobre 2013 : 366 morts
8 septembre 2012 : 200 morts
6 avril 2011 : 150 morts
31 mars 2009 : 230 morts
15 août 2007 : 14 morts
21 juin 2003 : 212 morts

Depuis 2000 : 22 400 morts (source OIM)

Ses opérations d’interception menées contre des êtres désarmés ressemblent à de sinistres manœuvres de chasses contre l’humain (en 2014; 75 % des migrants qui sont morts dans le monde ont péri en Méditerranée – Source OIM). Elles ont pour effet principal d’éloigner les routes de l’immigration irrégulière augmentant toujours plus la vulnérabilité des clandestins, les livrant à l’emprise de réseaux de trafiquant toujours plus malsains et de mieux en mieux organisés, sans chercher de réponses aux causes du problème (qui s’avère souvent être rentable).

Ces drames résonnent comme un cri sans écho au cœur de nos assemblées qui enchainent les commémoration face aux caméras du monde répétant constamment « qu’il faut agir maintenant » sans pour autant s’impliquer dans ces changements. En effet, ces changements reviendraient à remettre en question certains fondement d’une mondialisation à sens unique fondée sur les inégalités, et de manière plus profonde, une remise en cause de certains modes de vie qui, sans l’exploitation des ressources des pays émergents, ne seraient pas soutenables et ne le sont déjà pas d’un point de vue écologique.

C’est ainsi, par le refus d’une remise en question systémique du « système » , qu’on en arrive à des catastrophes humanitaires d’une ampleur dramatique. Des drames qui sont le reflets de la violence de nos frontières, de l’hypocrisie de nos gouvernements et de l’opportunisme de l’agence Frontex. La domination de l’argent sur tous les aspects de la vie nous enferme sur nos acquis, nous obligeant à pointer l’Autre du doigt, tout en nous rendant étranger à nous-mêmes et à nos valeurs constituantes : Liberté, Égalité, Fraternité.

« Ne pouvant fortifier la justice, on a justifié la force. » – Blaise Pascal

« On sera riche ensemble, ou on va se noyer tous ensemble » – Fatou Diome

¹ : Dimanche 12 et lundi 13 avril 2015, environ 6500 migrants sont arrivés sur les côtes italiennes – Voir article du Huffington post du 15 avril 2015

² : Documentaire de 17mn d’Euronews à voir sur le même thème que l’importation du riz : l’Europe plume l’Afrique (importation du poulet d’Europe en Afrique)

³ : Document à voir de TV5 Monde au sujet de Thomas Sankara ici

4 : Le Sénégal a signé, le 25 avril 2014, un accord bilatéral avec l’Union européenne sur la pêche. Cet accord permet à 38 navires de pêcher du thon, pendant cinq ans, dans les eaux sénégalaises. A lire : Sénégal: colère des pêcheurs après la signature d’un accord avec l’UE (RFI)

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